❘▶

Qu’est-ce que tu pensais Kenaï en revenant ici ? Que les gens allaient t’accueillir à bras ouvert, célébrer ton retour, tel l’enfant prodige revenant sur la terre promise ? Non bien sûr, dès qu’il avait fait le choix de revenir à Andesquacaon, Kenaï sût que ce ne serait pas facile. Et c’était sa conscience qui le torturait maintenant. Pourtant, durant ces 9 années de voyage à travers le monde, Andesquacaon était le seul endroit qu’il avait réellement put appeler maison. L’endroit où il pouvait trouver les seuls gens qui pouvaient le comprendre. Du moins il l’espérait. Encore déboussolé par la transe qu’il avait vécue dans la tente de Nanaka, il était maintenant assis non loin de celle-ci, tentant de calmer sa respiration haletante et les battements de son cœur bien trop rapides. Replongé dans un souvenir trop douloureux qu’il avait fui pendant des années, il se retrouvait maintenant face à ses vieux démons. Non mais tu t’attendais à quoi aussi ? Que tu allais revenir comme si de rien était ? Que tout ce que tu avais tenté d’effacer de ta mémoire avait disparu grâce à une intervention divine ? T’es vraiment stupide Kenaï. Oui, il aurait préféré ça, oui il était stupide. Un cocktail d’émotions dangereux avait empoisonné ses veines. Un litre de colère, envers Nanaka pour lui avoir fait revivre cet instant mais également envers lui-même, un demi-litre de tristesse, une tristesse qu’il avait pensé avoir maîtrisé, caché au fin fond de lui-même dans un coffre fermé à double tour. Et le dernier ingrédient secret, un zeste de nostalgie, pour un amour innocent à jamais perdu. Kenaï était une bombe, submergée par un trop plein d’émotion, prête à exploser. Les odeurs s’échappant de la tente de Nanaka étaient encore présentes et enrobaient l’air d’un parfum qui lui donnait mal à la tête. Le soleil avait longtemps laissé place à une lune, pleine et encore plus brillante qu’un diamant. Alors qu’il était encore plongé dans ses pensées, il entendit des bruits de pas tout doucement s’approcher de lui. Lorsqu’il leva la tête, une personne se trouvait face à lui, le dévisageant sans gêne. Bien qu’il fût difficile de voir la personne dans la nuit, les rayons laissaient entrapercevoir un visage et des courbes féminines. Taille moyenne, fine, de longs cheveux bruns et un regard perçant qui l’observait sous les moindres coutures. Cette femme lui paraissait étrangère et pourtant, un sentiment de déjà vu l’envahissait lorsque son regard croisait ses grands yeux clairs. Kenaï ne prit pas la peine de se relever ou de saluer l’inconnue, il se contenta d’envoyer un coup de tête en sa direction. « Un problème peut être ? ». Sa voix avait un ton irrité, indiquant clairement qu’il ne voulait pas être dérangé ou parler à qui que ce soit.